Le 18 juin, un amendement du Rassemblement National a été adopté par une majorité de députés français, actant le redémarrage de la centrale nucléaire de Fessenheim. Une décision symbolique qui soulève de nombreuses questions techniques et politiques.
La fermeture de Fessenheim : une décision politique
La centrale nucléaire de Fessenheim, considérée comme la doyenne des centrales françaises, a fonctionné de 1978 à 2020. Sa fermeture définitive découle de la loi du 17 août 2015 sur la transition énergétique pour la croissance verte, qui prévoyait notamment un plafonnement de la production nucléaire. En application de cette politique, les deux réacteurs ont été arrêtés en 2020, suscitant d’importants débats. En effet, plusieurs acteurs ont souligné le manque de raisons techniques justifiant sa fermeture, l’installation ayant été rénovée peu avant son arrêt. De plus, le remplacement de cette production bas-carbone par des sources thermiques plus émettrices de CO₂ a soulevé des questions sur la cohérence de la mesure face aux objectifs climatiques.
Une série d’observations avancent le motif politique de la fermeture de Fessenheim. Au début des années 2010, la catastrophe de Fukushima a fortement renforcé les positions anti-nucléaires, surtout auprès des formations politiques écologistes. En France, l’alliance menée entre Les Écologistes et le Parti socialiste, arrivé au pouvoir en 2012, pousse le gouvernement à prendre des mesures. Parallèlement, le rôle de l’Allemagne est également pointé par plusieurs observateurs. Outre-Rhin, la présence de la centrale, à proximité de la frontière, alimente des inquiétudes depuis plusieurs années. De plus, le pays est accusé d’avoir soutenu les réseaux anti-nucléaires en France afin d’accroître sa compétitivité économique.
La réouverture : un vote symbolique
Suite à l’arrêt des deux réacteurs présents dans la centrale, la phase de démantèlement du site a été lancée. Ce processus, d’une ampleur inédite en France, devait initialement s’achever à l’horizon 2040. En août 2022, le combustible a été totalement évacué du site. Ainsi, l’amendement déposé par le Rassemblement National en faveur de la réouverture du site a été qualifié d’irréaliste. Un certain nombre de parlementaires, dont Antoine Armand, rapporteur du texte sur la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE), ont rappelé que le démantèlement est déjà engagé, rendant toute remise en service difficilement réalisable.
Cette décision intervient alors que d’autres solutions plus pragmatiques et innovantes sont présentées afin de relancer la filière nucléaire. Le développement de réacteurs de nouvelle génération, comme les petits réacteurs modulaires (SMR) et les réacteurs à neutrons rapides (RNR), figure parmi les pistes étudiées. La commune de Fessenheim pourrait jouer un rôle pilote. En 2023, le maire Claude Brender a proposé d’y accueillir un démonstrateur SMR dans le cadre du projet Nuward porté par EDF.
Alix Cocard
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