La foire de Hanovre constitue un élément essentiel du succès allemand à l’export. Elle revêt une importance symbolique sur le plan économique et politique. En outre, elle reflète les ambitions et les craintes de l’Allemagne dans le changement de configuration actuel du commerce international.
La foire de Hanovre est la principale foire industrielle du monde, chose dont la presse française fait peu cas alors qu’elle constitue un outil central du succès industriel allemand et du dynamisme de ses exportations. C’est un événement économique et politique majeur en Allemagne. Ce pays ayant très tôt construit sa richesse sur l’industrie pour résoudre le problème du déséquilibre entre les ressources disponibles de son sol pauvre pour l’agriculture – contrairement à la France – et les besoins de sa population croissante. D’autant que l’exploitation économique et commerciale des découvertes scientifiques y est beaucoup plus rapide et systématique qu’en France.
La foire de Hanovre constitue un élément incontournable du versant commercial de la compétitivité hors-prix, dite structurelle, de l’Allemagne, largement responsable de sa réussite à l’export. La compétitivité structurelle est décisive sur le long-terme. Elle correspond aux capacités d’innovation ainsi qu’à la compétitivité technologique et commerciale (marketing, délais de livraison, service après-vente, etc…). D’autant que contrairement à la France, l’Angleterre ou les États-Unis, Berlin n’a pas utilisé les manipulations monétaires pour garantir la supériorité de ses exportations depuis la création du Mark en 1871.
Une foire créée pour exporter la production industrielle allemande
Un succès allemand d’initiative britannique
Contrairement à des villes comme Cologne, Francfort ou Berlin, Hanovre n’a pas de tradition de foire commerciale. Ce sont les Britanniques qui occupaient la Basse-Saxe et la Rhénanie du nord Westphalie à partir de 1945 qui ont pris l’initiative. Le chef de l’administration britannique et ancien dirigeant de Dunlop en Afrique du Sud, Brian Robertson, a donné la directive du lancement de la foire en avril 1947 par la création de la Deutsche Messe AG (DMAG), responsable de l’organisation de l’événement. L’objectif était triple. D’une part, il fallait que l’économie allemande des zones occupées soit relancée en aidant les industries des zones britanniques et américaines à exporter afin de récolter des devises pour payer les importations destinées à la population allemande, réduisant le fardeau financier britannique de l’occupation. D’autre part, il fallait concurrencer l’initiative soviétique du lancement de la foire de Leipzig le 8 mai 1946 en Allemagne de l’Est alors que la guerre froide commençait véritablement. Enfin, la foire devait permettre de convertir l’Allemagne et les Allemands de l’Ouest au capitalisme libéral occidental pro-libre-échange. La première foire de Hanovre appelée « Foire de l’exportation » a eu lieu entre le 18 août et le 17 septembre 1947. Ce fut un véritable succès. 736 000 personnes sont venues voir les exposants industriels allemands et leur production : VW coccinelle, machine à écrire, métaux, corseterie, coutellerie, mobilier, textile, métaux, etc… Une grande partie était des étrangers venus de 53 pays, principalement néerlandais, britanniques, belges, danois, américains et yougoslaves. À l’issue de la foire, 1934 contrats d’exportations ont été signés pour une valeur de 31,6 millions de dollars.
Un symbole du retour de l’Allemagne dans l’économie mondiale
La foire de Hanovre (Hannover Messe) marque le retour de l’Allemagne dans l’économie mondiale à l’époque où le Deutsch Mark et la République Fédérale n’existaient pas encore. Malgré l’isolement diplomatique de Bonn, la foire de Hanovre de 1950 a accueilli pour la première fois des exposants étrangers originaires de dix pays. Parallèlement, l’événement s’est structuré en deux avec un salon dédié à l’exportation et l’autre destiné à l’industrie. Ainsi, la foire a accompagné les industriels allemands de l’ouest en plein « Wirtschaftwunder » (miracle économique) faisant de la RFA le deuxième exportateur mondial dès 1959.
Bien plus que la première foire industrielle au monde
Aujourd’hui la foire de Hanovre est devenue la première foire industrielle du monde. La société qui l’organise, Deutsche Messe AG, est détenue à 50 % par le Land de Basse-Saxe et à 50% par la ville de Hanovre. En 2023, DMAG comptait 955 salariés dont une partie à l’étranger faisant d’elle une entreprise prestataire du service du Mittelstand au service de l’industrie allemande en organisant divers salons, congrès et colloques toute l’année. Aux salons habituels de machineries industrielles, la foire basse-saxonne a donné naissance à des salons qui sont encore leader dans leur domaine : DOMOTEX (revêtement de sol), LIGNA (travail du bois et sylviculture), BIOTECHNICA (biotechnologies), CeMAT (gestion des chaînes d’approvisionnement, logistique et manutention). Rien qu’en 2016, 25 000 exposants dont 9000 étrangers ainsi que 1,55 million de visiteurs (256 000 étrangers) défilèrent à Hanovre, injectant 1,2 milliards d’euros dans l’économie de la capitale de la Basse-Saxe. À la dimension publique de la gestion de la foire se mêle une gestion privée ainsi qu’une présence à l’internationale favorisant encore davantage le dynamisme industriel et exportateur de l’Allemagne.
Deutsche Messe AG : une multinational au service de l’internationalisation des entreprises allemandes
Le principe du pays partenaire
L’entreprise organisatrice de la foire de Hanovre, Deutsche Messe AG (DMAG), a marqué l’internationalisation de l’événement à partir de 1980 en invitant chaque année un pays partenaire. Ainsi, tous les ans pendant cinq jours, un pays présente produits industriels, particularités géographiques et culturelles. En 2016, il s’agissait des États-Unis. À cette occasion, le président Barack Obama était venu inaugurer l’ouverture de la foire avec Angela Merkel, faisant de Hanovre un lieu d’événement économique et politique majeur.
La Hannover Messer International GmbH
En 1981, Deutsche Messe AG, crée le département de Hannover Messe International qui devient une société à responsabilité limitée en 1985. Sous couvert « d’exporter le modèle de la foire de Hanovre à l’étranger », la filiale de DMAG soutient les entreprises allemandes dans leur stratégie d’internationalisation en organisant des salons ou en les faisant participer à des expositions dans le monde entier. Elle fait la promotion de leurs produits, en dispensant des conseils, en apportant un soutien logistique, en mettant en contact des entreprises allemandes avec d’autres groupes ou filiales à l’étranger pour conquérir des marchés. Depuis 1985, la filiale internationale de DMAG a à son tour créer d’autres filiales spécialisées en fonction des pays aux marchés à fort potentiel de croissance pour les firmes germaniques : États-Unis (1985), Turquie (1996), Amérique du sud depuis São Paulo (1998), Chine depuis Shanghaï (1999), Australie et Nouvelle-Zélande (2000), Inde (2007), Japon (2009), Russie et pays de la CEI (2011), Mexique (2016). Parallèlement à ses filiales officielles, la DMAG dispose d’autres intermédiaires privés en partenariat à l’image de la Global Fairs en France depuis 2007.
Une multinationale prospère qui noue des partenariats
De surcroît, Deutsche Messe AG, noue des partenariats avec d’autres foires allemandes à l’instar de celles de Düsseldorf et Munich. Ensemble, elles ont créé en 2001 la joint-venture German Exhibition Corporation International GmbH pour lancer une grande foire à Shanghai. Ces partenariats se font également avec des firmes étrangères, en particulier italiennes, deuxième force industrielle d’Europe, avec Fiera Milano et Italian Exhibition Group pour l’organisation de foire industrielles en Inde, en Russie, en Chine et au Mexique. Désormais multinationale, Deutsche Messe AG avait un chiffre d’affaires de 354 millions d’euros pour 46 millions d’euros de bénéfice ainsi qu’une hausse de sa trésorerie en 2023. La même année, 76 salons et événements ont été organisés dans le monde attirant 4,8 millions de visiteurs ainsi que 7 000 entreprises exposantes. C’est une réussite à tout point de vue. L’entreprise qui organise la foire de Hanovre agit en complément des chambres de commerce et d’industrie allemandes à l’étranger, celles qui jouent un rôle significatif du modèle allemand d’intelligence économique.
La foire de Hanovre en complément du modèle d’intelligence économique de l’Allemagne
La synergie avec les Auslandshandelskammern (AHK)
La foire de Hanovre et par extension Deutsche Messe AG ainsi que toutes les foires allemandes complètent et travaillent en étroite collaboration avec les 2300 employés des 150 bureaux des Chambres de commerce à l’étranger (AHK, Auslandshandelskammern) présentes dans 94 pays. Ces dernières soutiennent activement le commerce extérieur des entreprises allemandes pour conquérir des marchés ou accroître leurs parts de marchés outre-mer. Elles répondent à plus de 258 000 demandes d’entreprises par an. À ce titre, elles sont un ancrage essentiel pour les PME allemandes du Mittelstand. Les AHK servent de relais direct à la foire de Hanovre puisqu’elles les représentent directement dans les pays où les filiales de Deutsche Messe AG sont inexistantes à l’image de la Thaïlande, du Maroc et de la Grèce.
L’avance culturelle allemande dans l’ingénierie de l’information économique
Le management de l’information économique légale et illégale est un produit manufacturé à haute valeur ajoutée que les Allemands ont compris très tôt. Historiquement, depuis le XIXe siècle, les chambres de commerce allemandes à l’étranger en sont un relais important. Le sentiment de patriotisme économique pousse les firmes germaniques à chasser en meute sur les marchés conjugués à une ingénierie de l’information économique convergeant vers un centre composé des banques, des grands groupes industrielles, de l’État et de son corps diplomatique, des sociétés d’assurance, des maisons de commerce et entreprises de transport. À cela s’ajoutent les premières associations de promotion de l’industrie en Prusse comme « Verein zur Förderung des Gewerbefleisses » de Christian Beuth qui donna naissance au Gewerbeinstitut de Berlin en 1821 et qui pratiquaient l’espionnage industriel illégal en Angleterre et en France en particulier. Sans oublier les commis voyageurs souvent liés aux sociétés de commerce allemandes comme l’HAPAG qui étaient déjà 800 à Hambourg en 1905 ainsi que la complicité des immigrés et descendants d’immigrés allemands dans le monde. Ces derniers pouvaient renseigner les commis-voyageurs, les sociétés de commerce germaniques et les entreprises sur les contextes locaux. Tous ces éléments ont été capitalisés par les entreprises allemandes du XIXe siècle jusqu’à nos jours.
Le modèle allemand d’intelligence économique
Cette synergie entre les foires allemandes – Hanovre en tête – et les AHK au modèle allemand d’intelligence économique que le rapport Martre de 1994 avait désigné comme l’un des plus performants au monde. Ce dernier constitue un facteur déterminant de la compétitivité hors-prix de l’industrie allemande qui a su patiemment quadriller le globe pour trouver des marchés, protéger sa production nationale et la modifier en fonction des pays. Depuis la création de la RFA, les actions d’intelligence économique sont relayées par de multiples agences fédérales telles que l’Institut Goethe et les fondations politiques pour ce qui concerne l’influence à visée économique à l’étranger. Ainsi, les fondations des Verts et de Die Linke, Heinrich Böll et Rosa Luxemburg, ont mené des opérations d’influence anti-nucléaire en France financées et approuvées par l’État allemand qui a manié le double-discours dans ses relations avec Paris. Quant à la protection des acteurs économiques, le BND (services secrets), la Bundeskriminalamt et les seize Verfassungsschutz luttent contre l’espionnage industriel. De la même manière, les huit Allianz für Sicherheit in der Wirtschaft (ASW) regroupés par zones régionales font le lien entre les patronaux locaux et les directeurs de sûreté. Mais ce sont les Länder qui jouent un rôle important du fait de l’existence d’une économie publique territorialisée (Stadwerke, Sparkassen, L-Bank) inexistante en France. Les Länder travaillent activement à l’internationalisation des entreprises à l’image du dispositif Bayern International en Bavière pour aider les PME à l’export ou encore à travers les dispositifs nommés Wirtschaftsförderung, organisés de manière indépendante dans les Länder ou dans les villes. Ces dernières réalisent des études de marché dans les pays étrangers. Ainsi, au début des années 1980, le Sénat de Berlin-Ouest et des entreprises ouest-allemandes cofinancèrent le Wirtschaftsförderung Berlin GmbH pour cartographier les marchés en Europe de l’Est socialiste avant l’ouverture du mur de Berlin pour conquérir les marchés. Il existe aussi des centres de recherches comme le Fraunhofer Institut qui met à disposition des banques de données pour les entreprises germaniques. Autant d’entités régionales publiques et privées de collecte d’informations économiques destinées aux firmes allemandes qui disposent aussi des foires commerciales en Allemagne et à l’international.
Hannover Messe : miroir des ambitions et des craintes du monde politico-économique allemand
La montée des craintes allemandes vis-à-vis de la concurrence chinoise
Bien que le nombre de visiteurs de la foire de Hanovre connaisse une baisse depuis le Covid, 123 000 personnes sont venues sur le site en 2025, dont 40 % d’étrangers provenant de Chine, des Pays-Bas, du Canada, du Japon et des États-Unis. Les entreprises exposantes étaient essentiellement de très petites entreprises (32 %), des petites entreprises (27 %) et des ETI (24 %) dans les secteurs de l’ingénierie électronique et électrique, la construction et les technologies d’automatisation. Les thématiques au cœur de la foire étaient la transformation industrielle, l’application concrète de l’IA à l’industrie. À ce sujet, l’avancée chinoise inquiète les industriels germaniques. Depuis quelques années à Hanovre, ces derniers constatent avec sidération le rattrapage industriel de la Chine dans les secteurs industriels haut de gamme comme l’ingénierie mécanique, autrefois chasse gardée des exportateurs allemands. Et ce, dans un contexte où l’Allemagne connaît une phase de désindustrialisation en raison de la crise démographique et énergétique que traverse le pays.
Les ambitions commerciales avec le Canada face à la montée des protectionnismes
La foire de Hanovre est aussi le reflet des ambitions libre-échangistes de l’Allemagne, troisième exportateur mondial. À ce titre, les organisateurs avaient choisi le Canada comme pays partenaire pour l’édition 2025 avec 260 entreprises exposantes. Lors de l’inauguration, le chancelier allemand Olaf Scholz a apporté son soutien à Ottawa, menacé d’annexion par le président américain, tout en faisant la promotion du libre-échange contre le protectionnisme. À cet égard, le Canada a un accord de libre-échange avec l’Union européenne (CETA) depuis 2017. De son côté, Ottawa se vante de disposer des mêmes matières premières que la Russie tout en étant un État de droit et une démocratie dotée d’entreprises de haute technologie. Autant d’éléments qui attisent l’intérêt du patronat allemand en quête de nouveaux marchés pour compenser les États-Unis et la Chine. Néanmoins, cet appel de Berlin aux bienfaits du libre-échange à Hanovre peut être considéré comme un double-discours. D’après Global Trade Alert, l’Allemagne est le quatrième pays employant le plus d’interventions protectionnistes pour son économie derrière le Brésil, la Chine et l’Amérique tandis que la France est neuvième
L’intérêt allemand pour le Brésil et l’Amérique du Sud
Lors de la 40e rencontre économique germano-brésilienne de Wolfburg en septembre 2023, il a été décidé que le Brésil sera le pays partenaire de la foire de Hanovre entre le 20 et 24 avril 2026. La chambre de commerce (AHK) de São Paulo sert de représentant officiel de la foire. Elle travaille de concert avec l’Agence Brésilienne de Promotion des Exportations (Apex) pour l’événement. Le Brésil présente l’intérêt d’être à la fois un marché de 217 millions d’habitants, d’être bien doté en matières premières (lithium, pétrole, fer, nickel, niobium, manganèse) et d’être la porte d’entrée vers les pays d’Amérique latine dans le contexte où un accord de libre-échange entre le Mercosur et l’Union européenne est en cours de ratification. À ce propos, l’Allemagne est en faveur tandis que la France s’y oppose afin de protéger son agriculture. Le Brésil est aussi un pays où les entreprises allemandes et une diaspora allemande sont bien installées. Près de 1500 filiales d’entreprises allemandes sont présentes au Brésil, employant 250 000 personnes et générant 10 % du PIB industriel brésilien. Elles sont accompagnées par le soutien de banques allemandes comme DZ Bank à São Paulo et la complicité des descendants d’Allemands dans le pays. Ces derniers sont notamment présents dans les États du Rio Grande do Sul, Santa Catarina, Paraná, Espírito Santo et São Paulo. Une partie de ces descendants d’immigrés allemands a gardé des liens avec l’Allemagne ainsi qu’une forme de complicité et de sympathie en particulier dans le Rio Grande do Sul.
L’intérêt brésilien pour la foire de Hanovre
Du côté brésilien, la participation à la foire de Hanovre en 2026 a été accueillie avec grand enthousiasme. C’est une occasion de montrer au monde les avancées brésiliennes dans les technologies durables, les énergies propres (biocarburant, hydrogène vert) et l’automatisation alors que le gouvernement a mis en place le programme Nova Indústria Brasil (NIB) en 2024. L’Apex défendra les intérêts des entreprises brésiliennes en apportant des subventions pour leur participation à la foire. D’ailleurs, elle a identifié 16 projets sectoriels et entre 390 et 473 opportunités concrètes pour les entreprises brésiliennes en Allemagne (quatrième partenaire commercial) dans divers secteurs : machine et équipement de transport (moteur diesel et semi diesel, moteur à piston), produits alimentaires de l’agrobusiness (café non torréfié, viande bovine, soja), matière premières (minerais de cuivre et de fer, aluminium, acier). Outre l’Apex, les syndicats brésiliens à l’image du CNI et de la FIERGS, présidé par Claudio Bier, s’impliquent pour l’évènement. C’est l’un des plus importants car il représente l’industrie du Rio Grande do Sul. Sur les 75 entreprises brésiliennes présentes à Hanovre en 2025, 57 venaient de cet État. Grâce à la foire, une entreprise de la région Novus Automation a pu se constituer la moitié de ses clients internationaux. L’objectif serait que le chiffre d’entreprises brésiliennes à Hanovre dépasse les 200. Parallèlement, l’ambassadeur brésilien à Berlin, Roberto Jaguaribe, a déclaré que la foire servira de discussion commerciale relative à l’accord de libre-échange avec le Mercosur que Brasilia souhaite voir ratifié le plus vite possible.
Global Industrie : une foire de Hanovre à la française ?
Une inspiration récente de la foire de Hanovre
Le succès de la foire de Hanovre est à l’origine de la création de Global Industrie en 2018 qui en l’espace de cinq ans est devenu le salon de référence de l’industrie en France. Il a été créé à la demande d’Emmanuel Macron quand il était ministre de l’Économie en 2015 afin de redorer l’image de l’industrie dans l’Hexagone. En juillet 2017, GL events, spécialisés dans l’évènementiel, a créé Global Industrie en acquérant les salons Tolexpo (tôle) et Midest (sous-traitance) avec les salons Smart Industrie (nouvelle technologie industrielle) et Industrie (équipement de production). Bien que la surface des sites du parc Expo de Villepinte à Paris et d’Eurexpo à Lyon soit environ quatre fois plus petit que ceux de Hanovre (environ 392 000 m²), Global Industrie s’est différenciée dès le départ par le ralliement de l’ensemble des écosystèmes industriels français pour les décloisonner : fournisseurs, équipementier, sous-traitant, jeunes pousses, grands groupes. Sur ce point, Global Industrie compte des entreprises de machine-outil, des sous-traitants et des démonstrateurs, ce qui n’est pas le cas à Hanovre. À cela s’ajoutent d’autres écosystèmes en lien direct avec l’industrie comme les centres techniques et recherches (Institut Carnot), les syndicats (Symop, Artema, Gimelec, UITS), les pôles de compétitivité, les incubateurs et les institutions (ministère de l’éducation nationale, régions, chambres de commerce et d’industrie). L’événement est lié à Bpi France, très engagé dans la souveraineté et la réindustrialisation dont le directeur est le président d’honneur de Global Industrie. En 2018, 36 000 personnes sont venues à la première édition présentant 2254 exposants, dont environ 30% d’étrangers. Jusqu’à la crise Covid, les éditions de Global Industrie étaient en progression avant de se rétracter un peu après tout comme la foire de Hanovre.
Des similitudes mais une approche politique et internationale de moindre envergure
L’édition de 2025 à Lyon entre le 11 et le 14 mars s’est aussi concentrée sur les thématiques de l’IA, des données, de l’automatisation et de la cybersécurité. En parallèle, il y a les thématiques de la maintenance, de l’impression 3D et de la logistique. L’accent est beaucoup mis sur la formation professionnelle des jeunes car les industriels français font face à une pénurie inquiétante de main d’œuvre qualifiée et formée. Au total, 52 filières industrielles étaient présentes et originaires de 84 pays et attirant près de 25 000 visiteurs, dont 10 à 15 % d’étrangers. L’internationalisation de l’événement passe par des actions dans les pays étrangers ciblés que des délégations de Global Industrie visitent en utilisant les réseaux et les partenariats de GL events. Global Industrie est aussi un moment politique. En 2025, le Premier ministre François Bayrou était présent le 13 mars à l’événement accompagné des ministres de l’industrie et du travail. En revanche, a contrario de la venue systématique du chancelier allemand pour l’ouverture de la foire de Hanovre, le président de la République, Emmanuel Macron, n’est toujours pas venu sur le salon alors qu’il en est à l’origine et qu’il avait fait la réindustrialisation une des priorités de son deuxième quinquennat.
La foire de Hanovre, Deutsche Messe AG, et toutes les autres foires allemandes concourent à la compétitivité structurelle de l’Allemagne à l’export. Cela explique le soutien politique au plus haut niveau ainsi qu’une projection internationale efficace. Le savoir-faire français pour l’organisation d’événements internationaux comme les JO 2024 traduit les capacités de la France pour impressionner le monde et se faire désirer. À l’heure du besoin urgent de reconstruire l’économie française en la réindustrialisant, ne serait-il pas pertinent d’accorder la même importance politique, internationale et économique à Global Industrie qu’à la foire de Hanovre en Allemagne, au moins, voire aux JO de Paris 2024 ?
Yann Riveron
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