Loi Duplomb : la débâcle informationnelle du monde agricole [2/2]

En dix jours, la pétition d’une étudiante de 23 ans fait basculer l’affaire : #StopDuplomb franchit le million de signatures, tandis que la FNSEA et ses alliés peinent à occuper le terrain numérique. L’émotion l’emporte, et la loi devient le révélateur d’un monde agricole en difficulté sur le terrain informationnel.

Derrière la controverse, c’est un rapport de force informationnel qui se joue : d’un côté, le poids institutionnel de la FNSEA et d’un gouvernement en quête de souveraineté alimentaire ; de l’autre, une coalition agile de mouvements environnementalistes et de collectifs santé, passée maître dans l’art de viraliser l’émotion. Cette défaite informationnelle est la conséquence d’un monde agricole isolé, divisé et désarmé, souvent incapable d’anticiper et de structurer une démarche et une réponse appropriée à des attaques informationnelles de cette nature, qui ne font que s’amplifier avec le temps.Le 10 juillet 2025, un simple lien de pétition, posté par une étudiante inconnue, déclenche la phase décisive du conflit. En dix jours, #StopDuplomb atteint le million de signatures, des vidéos d’abeilles agonisantes et de malades du cancer saturent TikTok, tandis que le hashtag #SouveraineteAlimentaire ne perce jamais l’écosystème numérique. L’arme émotionnelle prend le pas sur le dossier technique ; la majorité parlementaire, privée de relais viraux, cède le terrain narratif.

Point de bascule : la pétition d’Eléonore et l’émotion au cœur du débat

Malgré l’ampleur des critiques, la loi Duplomb a d’abord suivi son cours institutionnel jusqu’à son adoption le 8 juillet 2025. À ce stade, la polarisation était déjà marquée, mais restait en partie cantonnée aux sphères militantes et politiques. Le point de bascule est intervenu dans les jours qui ont suivi, avec l’irruption d’une initiative citoyenne spontanée : la pétition lancée par Eléonore Pattery, une étudiante de 23 ans en santé environnementale.

Le 10 juillet, soit à peine deux jours après le vote final, Eléonore dépose sur la plateforme officielle de l’Assemblée nationale une pétition intitulée « Non à la loi Duplomb — Pour la santé, la sécurité, l’intelligence collective » (la description complète reprend les termes scientifique, éthique, environnementale et sanitaire). Ce qui aurait pu n’être qu’un énième cri du cœur en ligne a pris une dimension extraordinaire. En l’espace de dix jours, la pétition a battu tous les records de mobilisation citoyenne. Le 19 juillet, elle dépasse le seuil des 500 000 signatures (seuil à partir duquel, selon la loi, le Parlement doit envisager d’en débattre publiquement si les signataires proviennent d’au moins 30 départements différents). Or ce chiffre, jamais atteint auparavant sur la plateforme a vite été dépassé : plus de 1 million de personnes ont apposé leur nom le 20 juillet. Le 21 juillet, la barre d’1,3 million est franchie.

Comment expliquer un tel engouement fulgurant ? D’une part, le profil d’Eléonore a joué en faveur de la mobilisation. Son profil n’est pas sans rappeler celui de Greta Thumberg. Jeune, sans affiliation partisane ni lien avec les grands collectifs écologistes établis, elle s’est présentée comme une simple citoyenne indignée, ce qui lui a valu une image de David s’élevant contre Goliath. Sur ses réseaux sociaux, elle affirme n’être manipulée par personne, juste portée par ses convictions. Ce récit d’une étudiante lambda tenant tête aux puissants lobbies a été largement repris. D’autre part, le texte même de sa pétition est rédigé de manière percutante : elle y dénonce « l’aberration scientifique, éthique, environnementale et sanitaire » que constitue selon elle la loi Duplomb. En une phrase, elle jette l’opprobre sur tous les plans : la science, l’éthique (on sacrifie des principes moraux), l’environnement et la santé publique. Ce cadrage global et alarmant, largement relayé sur les réseaux sociaux et les médias, a trouvé un écho immédiat chez de nombreux citoyens qui, sans forcément maîtriser le détail du texte, ressentent une inquiétude diffuse face à ce qu’on leur présente comme une régression dangereuse.

Surtout, l’effet viral des réseaux sociaux a démultiplié la portée de l’initiative. En quelques jours, la pétition d’Eléonore a été partagée des centaines de milliers de fois, y compris par des personnalités de premier plan. L’acteur Pierre Niney (plus de 2 millions d’abonnés sur Twitter) l’a relayée, tout comme des animateurs, des scientifiques médiatiques et une foule d’élus de l’opposition. Cette promotion par des influenceurs et figures populaires a permis de toucher un public bien au-delà des cercles militants traditionnels. En parallèle, certains médias ont rapidement repris l’histoire, titrant « Contre la loi Duplomb, une pétition pulvérise tous les records ». En quelques jours, l’affaire Duplomb change de terrain : de politique et technique, elle devient sociétale et symbolique.

Ce point de rupture symbolisé par la pétition d’Eléonore Pattery a des conséquences concrètes. D’une part, il oblige les institutions à réagir : la Conférence des présidents de l’Assemblée devra organiser à la rentrée un débat spécifique sur le sujet (fait inédit lié au succès de la pétition). Certes, il ne s’agira que de débattre de la pétition elle-même, sans vote sur le fond du texte déjà adopté. Néanmoins, cet exercice obligera le gouvernement à se justifier publiquement. D’autre part, ce succès donne un nouveau souffle aux opposants pour occuper l’espace juridique avec notamment une saisine du Conseil constitutionnel (déposée le 11 juillet par plus de 60 députés de gauche), ainsi que d’une préparation de proposition de loi d’abrogation symbolique par l’opposition, etc. Quoi qu’il advienne juridiquement, la bataille de l’opinion, elle, semble avoir été remportée par les détracteurs de la loi Duplomb à ce stade.

De la rationalité à l’émotion : le glissement de terrain informationnel autour de la loi Duplomb

Parallèlement à la pétition, les protagonistes jouent sur le terrain de l’émotion. En effet, le 8 juillet, une scène inhabituelle s’est déroulée dans l’hémicycle : une militante, Fleur Breteau (atteinte d’un cancer et fondatrice du collectif Cancer Colère) a interpellé les députés en leur lançant : « Vous êtes les alliés du cancer, et nous le ferons savoir ! ». Cette irruption d’une victime du cancer au cœur du Parlement, relayée par des vidéos sur Internet, a marqué les esprits. Elle incarne l’indignation des malades face à une loi perçue comme favorisant des substances potentiellement cancérogènes. En effet, les associations de lutte contre le cancer brandissent ainsi le principe de précaution face à la potentialité cancérigène de l’acétamipride. Les images de Fleur, crâne nu sous les effets de la chimiothérapie, invectivant les élus, sont devenues virales.

Par ailleurs, les discours protagonistes ont progressivement glissé versle champs lexical de la toxicologie pour qualifier la loi. Des banderoles ou des slogans du type « Loi Duplomb, Loi Poison » ou encore « Mange, t’es mort » en exhibant les logos de Bayer-Monsanto renforce l’impact cognitif d’une agriculture coupable et toxique en raison des pesticides. Ce genre de slogan largement diffusé sur les réseaux contribue à déplacer le débat vers le registre de l’émotion et de l’indignation morale. Le récit dominant est devenu celui du citoyen vulnérable (l’abeille décimée, l’enfant exposé aux cancers, l’eau qu’on ne pourra plus boire) face à des intérêts agro-industriels jugés cyniques. En face, les arguments rationnels sur la compétitivité ou la souveraineté sont complètement invisibilisés et délégitimés.

Rapport de force informationnel : canaux d’influence et narratifs opposés

Cette séquence autour de la loi Duplomb offre un cas d’école en matière de guerre de l’information dans le domaine agricole. On y observe deux camps, eux-mêmes sous divisés en acteurs, aux stratégies très différentes.

Une approche institutionnelle et traditionnelle des protagonistes

D’une part, les promoteurs de la loi (FNSEA, majorité gouvernementale, grands exploitants) ont principalement mobilisé les canaux institutionnels et l’influence traditionnelle. Avant le vote, la FNSEA a fait un travail de lobbying direct auprès des parlementaires – le texte final reprenant mot pour mot certaines de ses propositions en atteste. Le syndicat majoritaire a notamment obtenu la remise en cause du plan Écophyto (qui vise à réduire l’usage des pesticides) conformément à ses demandes après la crise agricole de début 2024. Dans la commission mixte paritaire qui a ficelé le texte, sur 14 membres on comptait 11 élus issus du monde agricole (dont 4 anciens cadres de la FNSEA). Cette influence de coulisses s’est doublée d’actions de terrain plus classiques : par exemple la FNSEA avait organisé en février 2024 des opérations escargot et barrages filtrants, qu’elle a suspendus lorsque le gouvernement a accédé à ses revendications, dont la promesse d’intégrer l’assouplissement sur les pesticides dans la loi.

En termes de communication publique, les partisans de la loi se sont montrés relativement discrets et sur la défensive. Ils se sont exprimés via des canaux officiels (communiqués du ministère, interviews dans la presse agricole ou économique) en tenant un discours technique et rassurant. Toutefois, les protagonistes n’ont que peu investi les réseaux sociaux grand public pour porter la contradiction face à la campagne virale de l’autre camp. Il n’y a pas eu, par exemple, de mobilisation massive des agriculteurs sur Twitter pour soutenir la loi, ni de contre-pétition citoyenne significative (une tentative de pétition pro-loi a été lancée en réaction, mais n’a recueilli que quelques milliers de signatures, sans visibilité médiatique). L’écosystème favorable à la loi (grands syndicats, fédérations d’industriels, certains élus ruraux) n’a pas su ou voulu adopter une stratégie d’influence numérique agressive.

Une synergie informationnelle dynamique et efficace des opposants

D’autre part, les opposants à la loi (ONG, collectifs citoyens, Confédération paysanne, partis de gauche) ont au contraire été très réactifs et efficaces dans l’occupation de l’espace public et médiatique. Leur stratégie (ou action) s’est déployée sur plusieurs fronts de manière coordonnée :

Sur le terrain physique, ils ont organisé des manifestations (par exemple 60 manifestations organisées le 30 juin), des conférences de presse avec des acteurs variés (agriculteurs, médecins, patients, etc.), et des actions coups de poing. Par exemple, peu après le vote, des militants écologistes et paysans ont brièvement bloqué l’entrée d’une usine de pesticides appartenant à BASF pour dénoncer la réintroduction des néonicotinoïdes. Ce type d’action qui associe symboles, images chocs et participation d’acteurs locaux assure une couverture presse favorable aux opposants.

Sur le terrain numérique, leur présence a été massive et habile. Des hashtags dédiés (#LoiDuplomb, #LoiPoison…) ont tourné en trending sur Twitter. Les ONG environnementales ont diffusé infographies et vidéos pédagogiques expliquant les potentiels dangers de la loi. Les collectifs de citoyens ont utilisé des plateformes comme Facebook et Instagram pour partager des témoignages (d’apiculteurs constatant des abeilles mortes, de riverains inquiets pour l’eau potable, etc.). Des relais d’opinion (influenceurs, artistes, scientifiques engagés) ont porté leurs messages à un public élargi. Par exemple, ce fut le cas avec le partage la pétition d’Eléonore par des célébrités, mais aussi avec des tribunes de médecins cancérologues, de chercheurs en écologie ou de figures politiques vertes, publiées dans la presse ou diffusées en ligne… Faute de données consolidées accessibles au public, il est toutefois manifeste que le hashtag « #StopDuplomb » a bénéficié d’une bien plus grande visibilité que son homologue « #SouveraineteAlimentaire » sur les réseaux sociaux, notamment sur X et TikTok, où aucun contre-récit pro-loi significatif n’a émergé.

En termes de narratif, le camp adverse simplifie et dramatise systématiquement le débat. Plutôt que de discuter des nuances de chaque mesure, le discours a martelé quelques idées-forces percutantes : « cette loi va nous empoisonner », « elle va tuer les abeilles », « elle brade notre eau aux industriels », « elle signe la fin des paysans ». Ainsi, l’acétamipride est qualifié sans détour de « tueur d’abeilles »…. De même, la loi est présentée comme « organisant la privatisation des ressources en eau » et « exonérant les élevages de toutes garanties environnementales », pour reprendre les termes indignés d’une députée d’opposition. Ce langage alarmiste, parfois à la limite de l’exagération, s’est révélé redoutablement efficace pour rallier l’opinion. Les thèmes anxiogènes (cancer, pollution de l’eau, extinction des abeilles, maltraitance animale) dominent l’espace médiatique et relèguent les considérations techniques (clauses de revoyure, pourcentages limités de surfaces concernées, etc.) au second plan. Il s’avère que dans l’arène médiatique, ce type d’attaque contre une partie du monde agricole est un classique et est souvent qualifié d’agribashing. Ici, cette règle s’est vérifiée : la phrase de Fleur Breteau « Vous êtes les alliés du cancer » a fait la une, bien plus que les justifications du ministre sur la nécessité de ne pas handicaper nos betteraviers.

Enfin, les opposants ont su et continuent de construire une image morale positive d’eux-mêmes (« on se bat pour la santé, pour la nature, pour l’avenir des enfants ») tout en diabolisant le camp d’en face (« ils protègent les profits de l’agrochimie au mépris de tout »). Cette dichotomie est résumée par la formule de la députée LFI Aurélie Trouvé dénonçant « un traité de soumission à l’agrochimie », ou par la pancarte « Bayer+Monsanto : mange, t’es mort ». En positionnant ainsi la bataille comme le bien commun contre les intérêts privés, les contestataires ont remporté l’adhésion d’une partie du public qui, a priori, n’avait pas d’opinion sur la question agricole.

Il ressort de cette confrontation que le rapport de force informationnel a largement penché en faveur des anti-loi, du moins dans la sphère médiatique et citoyenne.

Quel risque d’ingérence étrangère dans le rapport de force informationnel autour de la Loi Duplomb ?

L’École de Guerre Économique a publié en 2024 un rapport intitulé « Ingérence économique dans la production alimentaire française » qui met en lumière le rôle de certains acteurs étrangers, notamment américains, dans le financement de causes écologiques en France. Par exemple, le rapport révèle que plusieurs fondations américaines financent l’activisme animaliste en France dans le but (inavoué) de déstabiliser nos filières d’élevage. L’ONG L214, fer de lance de l’anti-élevage intensif, a ainsi reçu des millions de dollars de l’Open Philanthropy Project, un fonds américain lié à des milliardaires de la tech investissant par ailleurs dans la viande artificielle et les protéines végétales. De même, Greenpeace, Sea Shepherd ou Bloom bénéficient de subsides étrangers non négligeables, parfois de la part d’acteurs économiques ayant intérêt à affaiblir les industries agroalimentaires européennes. Il s’agit ici d’une guerre économique menée via des ONG environnementales, qui construisent un narratif culpabilisant pour les agriculteurs (accusés de polluer, de maltraiter les animaux, etc.) afin de peser sur les réglementations. Ce narratif est souvent repris sans recul par les médias qui promeuvent des campagnes alarmistes, et contribue à ancrer dans l’opinion l’idée que l’agriculture française est « toxique » ou « cruelle ».

Dans le cas de la loi Duplomb, on retrouve certains de ces thèmes (bien-être animal, dénonciation de l’agro-industrie, mise en avant de victimes comme les abeilles ou les malades) qui s’inscrivent dans un continuum d’actions antérieures. Cela ne signifie pas que la contestation ait été téléguidée de l’étranger (rien n’indique, par exemple, que la pétition record ait d’autres auteurs que la jeune femme qui l’a initiée). Mais le terreau idéologique sur lequel elle a prospéré, a été en partie fertilisé par des campagnes menées de longue date, dont certaines avaient possiblement des soutiens internationaux. Autrement dit, l’influence de certaines fondations ou ONG, qui tirent le débat public dans la polarisation plutôt que dans la concertation et le compromis, s’appuie sur des dynamiques d’ingérence et de production de connaissance parfois financées par des intérêts antagonistes aux intérêts français. L’élan né de la contestation de la loi Duplomb est peut-être spontanée, mais il est nourri par des acteurs qui tirent leurs moyens et leur légitimité, pour certains d’entre eux, à travers la représentation et l’incarnation d’intérêts étrangers. C’est par exemple le cas des ONG qui luttent contre l’élevage, mais qui sont financées par des ONG américaines qui souhaitent voir émerger la viande de synthèse sur le marché européen.

En d’autres termes, la bataille informationnelle qui se mène actuellement autour de la loi Duplomb n’est pas en tant que telle l’œuvre d’une ingérence flagrante. Le mouvement est probablement trop spontané pour avoir été orchestré. En revanche, certains intérêts économiques ont construit, des années durant, un terreau idéologique et cognitif qui permet aujourd’hui d’alimenter et de soutenir l’opposition qui est actuellement faite autour de la loi. Par ailleurs, la France étant particulière sujette à des tentatives de déstabilisation russe, il n’est pas non plus improbable que l’écrasante domination des discours des anti-loi sur les réseaux sociaux soit soutenu par des relais d’influence russes (ferme à troll), comme ils ont pu à l’époque le faire avec les punaises de lit. Il s’agit ici d’hypothèses qui devront être vérifiées avec le recul et davantage d’informations.

Une bataille informationnelle perdue, quelles leçons pour l’agriculture française ?

Au terme de cette séquence, la loi Duplomb restera peut-être dans les textes, mais le monde agricole français en sort globalement perdant sur le terrain le plus décisif aujourd’hui : celui de la bataille de l’opinion. Ce n’est pas une simple polémique passagère : cette bataille met à nu un secteur isolé, divisé et désarmé sur le plan informationnel, pris en tenaille entre des attentes sociétales de plus en plus fortes et des forces militantes structurées, qui disposent de relais puissants dans les médias, les ONG et les réseaux sociaux.

Même si le débat institutionnel qui s’ouvrira à la rentrée au Parlement risque de rester symbolique, la dynamique d’opposition lancée autour de la loi Duplomb fragilise un peu plus le monde agricole et nourrit des forces antagonistes, désormais capables de coaliser rapidement des fronts disparates (écologistes, anti-élevage, militants de la santé, mouvements citoyens…).

Plusieurs indices suggèrent qu’une simple influence institutionnelle (négociations de couloir, relais syndicaux) ne suffit plus à préserver la légitimité du secteur. Les batailles informationnelles se construisent autant sur des terrains numériques, que sur la solidité des argumentaires techniques. Certains acteurs agricoles commencent à intégrer cette réalité : multiplication de comptes « Agri-Twittos », journées portes ouvertes relayées en direct, projets de cellules de veille… Pour l’heure, ces initiatives demeurent ponctuelles et ne constituent pas encore une stratégie cohérente.

À moyen terme, la capacité du monde agricole à maintenir sa compétitivité, son poids politique et sa légitimité sociale pourrait dépendre d’une approche plus structurée d’intelligence économique : observation des signaux faibles, anticipation des polarisations sociétales, développement de narratifs, dialogue régulier avec la société civile, création de forces de soutien externes au milieu agricole…

L’enjeu dépasse la communication ; il touche à la souveraineté alimentaire, à la confiance entre producteurs et consommateurs, et à la place de l’agriculture dans la société. Sans évolution sur ce terrain, chaque controverse future, qu’elle concerne l’eau, les phytosanitaires ou le bien-être animal, renforcera le risque informationnel et isolera davantage le secteur. La question n’est donc pas de savoir s’il faut ou non « réarmer » la communication agricole, mais plutôt de déterminer comment articuler, de façon crédible, performance économique, exigences sanitaires et attentes environnementales dans un espace public de plus en plus réactif et interconnecté et polarisant.

Étienne Lombardot

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