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Nokia prend la tête d’Hexa-X pour lancer la R&D européenne vers la 6G

Alors que le déploiement progressif de la 5G en France ne fait que commencer et reçoit un accueil mitigé, l’Union européenne mise déjà sur la 6G en déléguant la gestion du projet de R&D Hexa-X au finlandais Nokia et rejoignant ainsi la course de fond dans laquelle sont déjà engagés la Chine et les Etats-Unis.

Ce 7 décembre, Nokia a annoncé le lancement d’un consortium européen destiné à organiser les travaux de recherche et développement pour la 6G et définir ses premiers éléments de pré-standardisation, illustrant une volonté d’influence sur cette technologie par les normes.

Dans sa vision globale, l’équipementier ambitionne de connecter le physique, le numérique et l’humain. A cet effet, il est prévu de présenter des cas d’usage et scénarios sur 6 axes fondamentaux : interconnexion des intelligences (y compris IA et machine learning), agrégation de réseaux différents susceptibles d’interagir entre eux, optimisation de l’empreinte environnementale, universalité de la couverture réseau, amélioration ‘’ultime’’ des performances et spécifications techniques, enfin sécurité, résilience et fiabilité des communications et des données. Financé par le programme européen de recherche et d’innovation Horizon 2020, le projet est censé durer deux ans et demi et doit démarrer le 1er janvier 2021.

Dans cette initiative, Nokia est entourée de 22 acteurs de 9 nationalités (Allemagne, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Suède, Etats-Unis), présents sur l’ensemble de la chaîne de valeur des télécommunications : opérateurs mobiles, équipementiers, fabricants de semi-conducteurs, éditeurs de logiciels, d’applications et de solutions ICT (Information and Communication Technologies), auxquels s’ajoutent les universités et instituts de recherche du continent et plus marginalement des acteurs de l’énergie et des transports. On y retrouve notamment le suédois Ericsson (qui revendique la codirection du projet et la gestion du volet technique), les français Orange, Atos et le CEA, l’allemand Siemens et l’italien TIM (Telecom Italia Mobile), mais aussi l’américain Intel, également membre de la Next G Alliance outre-Atlantique, récemment rejointe par Apple et Google.

Cette dernière organisation sert justement de plateforme de rassemblement des acteurs américains (ainsi que de Samsung, Nokia et Ericsson), résignés de leur retard et de l’absence d’équipementier national 5G pour mieux préparer une domination sur la génération suivante. La Chine, qui travaille officiellement sur le sujet depuis novembre 2019 avec Huawei, vient de lancer un satellite compatible avec la 6G visant à étudier les futures fréquences utilisables pour cette technologie. D’autre part, la mission a aussi pour but d’expérimenter la qualité de transmission de ces éventuelles fréquences 6G entre le satellite et la Terre, et de surveiller l’émergence de risques naturels.

Cet événement prend effectivement tout son sens quand on sait (d’après les premières études et livres blancs de Samsung et Docomo) que la 6G, d’un débit 50 à 100 fois supérieur à son « futur ancêtre » sera en mesure de couvrir non seulement la surface terrestre mais aussi l’espace et les océans, et d’en exploiter les données transformées par l’intelligence artificielle pour produire massivement hologrammes, doubles numériques et réalité immersive. Au-delà des usages industriels, le potentiel de la 6G serait donc assez important pour qu’un réseau créé sur cette technologie soit doté d’un sixième sens, bouleversant ainsi profondément les comportements humains.

En attendant la métamorphose d'une science-fiction en réalité, il reste à souhaiter à Hexa-X de ne pas connaître le même sort que celui de Gaia-X, une initiative europénne fondée sur la souveraineté numérique et récemment rejointe par les GAFA et les BATX.

 

Louis-Marie Heuzé

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