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L’ADN européen

Le degré d’empathie des populations face aux nouvelles problématiques engendrées par les crises successives repose sans doute sur le partage de valeurs ou de destinées communes. Pourtant, l’Europe apparaît aujourd’hui divisée sur les questions d’énergie, d’intervention militaire ou économique dans les pays où la crise se fait sentir de façon plus aigüe.

 

Tandis que certains cherchent en vain les éléments constitutifs de l’ADN européen, puisqu’il est clair que ce n’est plus le charbon et l’acier, Bruxelles sa capitale se retrouve tiraillée entre Francophones et Flamands qui ne parviendraient plus à trouver une destinée commune.

Lorsqu’on parle de vivre une même réalité, s’agit-il du quotidien, d’un passé ou d’un futur ? Aujourd’hui, l’intensité de l’actualité mondiale génère un tel bruit médiatique que la juste appréciation de tout un chacun sur ce qui constitue son quotidien est très délicate. Dans ce contexte, les messages les plus efficaces sont courts et percutants et l’analyse passe souvent au second plan.

La compréhension de la situation politique belge demande aussi de prendre le temps de l’analyse, dans un cadre plus large que ses frontières géographiques, voire linguistiques comme certains le voudraient. L’objectif de l’exercice est-il de démontrer que les régions les plus riches d’Europe doivent présider seules à leurs destinées si elles souhaitent plus d’autonomie et de richesses ? Mais de quelles richesses parle-t-on ? La propension à en créer en surplus ou juste à rembourser ce que l’on doit ? En effet, le montant de la dette des pays est connu. Exprimé en pourcentage du PIB, c’est bien de confiance en la capacité de remboursement dont il est aujourd’hui question. Cette « nouvelle réalité » ne date pourtant pas d’hier.

A l’échelle de l’Europe, la Belgique est un laboratoire, un territoire sur lequel des individus d’origines diverses et métissées partagent un quotidien. Rien de très particulier à l’heure de la mondialisation. Au niveau politique, un Etat fédéral délègue certains pouvoirs aux Régions et Communautés. En tant qu’Etat fédéral, la Suisse partage un certain nombre de caractéristiques avec la Belgique. Elle cultive aussi la particularité d’être proche tout en ne faisant pas partie de l’Europe.

Européen ou non, un Etat souverain comme la Belgique devrait sans doute parvenir à trouver seul une issue face à l’impasse politique actuelle. Herman Van Rompuy est d’ailleurs intervenu récemment, rappelant l’urgence d’aboutir à un accord pour la formation d’un Gouvernement. Rappelons qu’il quitta le poste de premier Ministre belge pour occuper le poste de Président du Conseil Européen à partir du 1er décembre 2009, tandis que le Gouvernement belge tombait en avril 2010.

Actuellement, de nombreux pays européens adoptent le même comportement que la Belgique, privilégiant les affaires étrangères aux affaires intérieures. La distinction entre ces dossiers n’est, il est vrai, pas toujours évidente. Pour les économistes, certains pays comme la Grèce ou l’Espagne devraient sans doute dévaluer leur monnaie. Le hic, c’est qu’aujourd’hui leur monnaie n’est plus seulement leur monnaie.

C’est peut-être paradoxal mais l’une des conséquences de la crise financière est que les agences de notation font plus que jamais la pluie et le beau temps, tandis qu’elles n’ont pas vu venir la crise. Certains Etats européens non concernés par les récents plans d’austérité sont d’ailleurs dans leur collimateur.

Pour autant, peut-on en conclure que dans le contexte économique actuel, c’est le niveau de leur dette qui lie les individus entre eux ? Ensemble, les Islandais ont refusé de rembourser la Grande-Bretagne et les Pays-Bas pour les erreurs de leurs banques. En Belgique, Francophones et Flamands finiront-ils par s’entendre parce que les autres ne voudront pas partager les dommages collatéraux d’un divorce ? Contagion séparatiste et perte de confiance sont sans doute les pires maux dont un pays puisse souffrir dans le contexte économique actuel.

Claude Lepère