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Rachat des turbines Arabelle par EDF : quel avenir pour l’expertise nucléaire française ?

C’est officiel, après des mois de négociations, vendredi 4 novembre l’accord du rachat de GE Steam Power par EDF est signé. Une partie de la construction et de la maintenance de la branche nucléaire de la société revient sous drapeau français mais l’activité entière n’est pas cédée à l’entreprise française, et les modalités sont encore à préciser.

Il y a sept ans, en 2014, la société Alstom décidait de céder l’une de ses branches les plus stratégiques à l’américain General Electric : la branche énergie. Une vente controversée qui a conduit à de nombreux procès et qui a eu des graves conséquences sur notre indépendance énergétique puisque c’est cette branche qui possédait les compétences en termes de construction des chaudières nucléaires et turbines Arabelle, l’une des plus puissantes du monde.

Bien que la France compte parmi les grandes puissances nucléaires, la politique énergétique de ce secteur a connu de lourds événements. Après la vente inattendue de la branche nucléaire d’Alstom aux américains, les investissements de l’État ont diminué. En effet, lors de son premier mandat en 2017, le président Emmanuel Macron avait décidé de réduire la part d’énergie nucléaire dans la production énergétique globale de la France.

Aujourd’hui, après un changement de politique concernant l’énergie nucléaire, le gouvernement choisit finalement de relancer pleinement son activité et ses investissements pour viser sa neutralité carbone. Après l’annonce de projets de construction de nouveaux réacteurs, Emmanuel Macron a annoncé dans les anciennes usines d’Alstom de Belfort que « le temps de la renaissance du nucléaire est là ». Aujourd’hui encore la relance de la politique nucléaire de la France devrait s’intensifier : un projet de loi pour accélérer les procédures de construction d’installations nucléaires vient d’être déposé ce jeudi 3 novembre. Une politique de l’énergie nucléaire qui, pour le moment, jouit de la taxonomie verte, un statut grandement controversé et remis en cause par certains États membres.

 

Division de l’activité et des marchés de GE Steam Power

EDF récupère une partie de la construction de réacteurs nucléaires et donc les compétences et savoir-faire pour continuer à développer cette branche et ses offres futures mais ne rachète pas la totalité de l’activité : l’acquisition concerne l’îlot conventionnel des centrales nucléaires. Ainsi, EDF récupère la fourniture des équipements pour les nouvelles centrales mais aussi la maintenance et les mises à niveau des équipements déjà existants. En effet, les turbines à vapeur de GE Steam Power équipent aujourd’hui la moitié des centrales nucléaires du monde et la totalité des centrales d’EDF en France. Le retour des turbines Arabelle dans la propriété industrielle française représente l’élément principal de ce rachat, symbole de la puissance du nucléaire français.

Les limites de ce rachat concernent, dans un premier temps, la délimitation géographique : en effet, General Electric conserve les fournitures et les maintenances des centrales nucléaires du continent américain dans son ensemble, nord et sud. EDF aura cependant le droit de pénétrer le marché pour de nouveaux projets. General Electric se garde également le droit de conserver GE Hitachi Nuclear Energy, une alliance américano-japonaise qui développe notamment le premier Small Modular Reactor (SMR) qui sera commercialisé. De plus, l’acquisition ne concerne pas la branche des énergies fossiles, une branche qui concerne une centaine de salariés en France et dont la durée du contrat dépend des contrats de maintenance des centrales à énergie fossile.

Les détails de la vente seront connus dans les mois à venir ainsi que la prise de position d’EDF sur certains projets, la passation des activités ne devant se faire qu’au deuxième trimestre de l’année 2023. En effet EDF deviendra constructeur en plus de son statut de fournisseur ce qui compliquera les rapports avec d’autres sociétés telles le russe Rosatom qui deviendra à la fois client et concurrent d’EDF, sans compter les complications politique actuelles à l’égard de la Russie.

Dans le cadre d’un réinvestissement du gouvernement dans le nucléaire, l’organisation de cette acquisition dans les mois à venir permettra à EDF d’établir son nouveau statut de constructeur-producteur avec ses deux entités distinctes, un nouveau statut qui se mettra en oeuvre très prochainement pour les constructions de nouveaux réacteurs en France et en Angleterre.

 

Alexandra Gomez

 

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