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[JdR] Les « captives », un atout pour le Risk Management

Peu connues du grand public et trop souvent assimilées à un outil d’optimisation fiscale, les sociétés captives sont pourtant reconnues par les Risk Managers comme un instrument de financement et de pilotage des risques utile à leur politique de prévention. Cet article se propose de faire un focus sur les captives et sur leur environnement règlementaire.

Captive ? vous avez dit captive ?

Une captive est une société d’assurance ou de réassurance interne, qui a pour but d’optimiser la gestion des risques d’une grande entreprise. En effet, ce dispositif s’adresse à des entités qui comptent de nombreuses filiales et qui se trouvent généralement partout dans le monde pour plusieurs raisons : l’optimisation des flux de trésorerie, une collecte centralisée de l’information, un accès direct au marché de la réassurance ou encore une meilleure compréhension des sinistres. L’important est que si la captive n’est pas nécessairement détenue à 100% par la maison mère, son unique but reste de couvrir uniquement les risques du groupe. Le secteur des captives est l’un des plus dynamiques dans le champ de l’assurance puisqu’elles passent de 100 en 1968 à près de 6700 aujourd’hui dont plus de 120 crées par des entreprises françaises.

D’un point de vu assuranciel, cet outil permet à l’entreprise de conserver et de mutualiser des fonds afin de financer des risques propres à son cœur de métier. Ainsi les captives répondent à un besoin de protection du bilan. Concrètement, une multinationale avec de nombreuses filiales de taille petite ou moyenne va pouvoir dans son bilan faire baisser les coûts des assurances avec la création d’une captive. Sans ce dispositif l’entreprise serait obligée de souscrire un contrat d’assurance au niveau du groupe, qui serait trop cher puisqu’il ne tiendrait pas compte des spécificités locales en imposant une franchise identique à l’ensemble des filiales. La captive peut, quant à elle, faire baisser localement la franchise en en prenant une partie à sa charge. Elle est également un bon outil de réassurance puisque certains risques qui représentent un impact financier important ne peuvent pas nécessairement être transférés au marché de l’assurance classique.

Les captives sont particulièrement intéressantes pour les entreprises dont une partie de la sinistralité est certaine et récurrente, dans la mesure où elles permettent de prendre en charge les petits sinistres et de couvrir ces risques à faible coût, en évitant le chargement et les frais appliqués par les assureurs du marché. De fait, les expositions les plus attractives pour l’intervention des captives sont les risques de faible fréquence et la rétention de tout ou une partie des risques de faible amplitude, parce qu’ils sont prévisibles sans pour autant avoir besoin d’un apport financier important (ex : dommages aux biens, flottes automobiles, transports…).

Une captive ? Pour y mettre quels actifs ?

Globalement, les risques pris en charge sont de trois catégories :

  • Les risques assurés si le Risk Manager peut apporter la démonstration qu’il peut faire mieux que le prix du marché. Ici le Risk Manager va devoir déterminer un seuil à partir duquel cela a du sens de les prendre à sa charge.
  • Les risques non assurés : il existe des produits que l’on peut considérer en fonction des besoins du client. Par exemple, une entreprise qui connaît bien 80% de ses clients, aimerait s’assurer uniquement pour les 20% restants. En mettant en place une captive, elle peut s’auto-assurer contre le risque réel posé par ses petits clients, et acheter une protection excédentaire sur le marché, à un prix plutôt bas.
  • Les risques non assurables : par exemple les problèmes liés à la fraude ou à l’image de marque.

Le marché des captives est aussi préempté par des secteurs d’activités qui ont des spécificités particulières, comme le secteur bancaire (fraude et de Responsabilité Civile Professionnelle)  ou encore le secteur pharmaceutique ou la responsabilité civile de l’entreprise est fortement engagée. Par conséquent, l’analyse des risques pour fonder une captive se base sur deux axes, la fréquence et la rareté. A noter que les captives peuvent aussi permettre à la structure d’assurer les risques de pointe ou émergents, pour lesquels il y a peu ou pas de solutions sur le marché traditionnel de l’assurance et de la réassurance, ou des offres trop onéreuses.

Une fois la décision de créer une captive prise, l’entreprise doit s’interroger sur le cadre règlementaire, parfois très contraignant, qui régit les captives.

Un cadre règlementaire contraignant

Depuis le 1er janvier 2016, le dispositif Solvabilité 2 applique les même règles aux captives et aux des sociétés d’assurance et réassurance. Ceci implique l’application des mêmes règles et exigences que les grands assureurs ou réassureurs en la matière. De fait, elles doivent remplir les mêmes exigences de représentation, de provisions techniques, de reportings au régulateur et de communication de fonds propres, de gouvernance, de comités de souscription… Autre évolution du contexte réglementaire, les recommandations Base Erosion and Profit Shifting émises par l’OCDE en 2016, et mises à jour en mars 2017, ont pour objectif de lutter contre l’érosion de la base fiscale et les transferts de bénéfices. Elles poussent les entreprises à respecter de bonnes pratiques, imposant entre autres aux captives une substance juridique effective et des niveaux de primes techniquement équivalents à ceux proposés par le marché.

Se positionner sur une captive est une décision importante dans la vie d’une entreprise. En tant que pilote de ce nouvel outil, le Risk Manager voit son rôle renforcé au sein de la structure. Avec la multiplicité des risques et la montée en puissance de risques onéreux comme le risque cyber, de la propriété intellectuelle, ou encore les risques environnementaux, les captives semblent avoir un bel avenir en dépit des contraintes qui les régissent.