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Le coronavirus (Covid-19) peut-il initier le renforcement de la souveraineté française en matière de santé ?

La République Populaire de Chine fait face aujourd’hui à deux épidémies simultanées pour lesquelles elle représente le foyer principal : le Covid-19 et la peste porcine. Cette dernière est inoffensive pour les humains mais n’est pas sans conséquences pour le secteur de la santé.

Le 3 mars 2020, Emmanuel Macron annonçait que les masques de protection de type FFP2 et « anti-projections » étaient réquisitionnés par l’État jusqu’au 31 mai 2020, sur la base de dispositions du Code de la santé publique. Une mesure bien reçue par les professionnels de santé qui en sont les premiers bénéficiaires, étant en première ligne face à l’épidémie de Covid-19 affectant la France. 

 

Ce recentrage sur les besoins nationaux peut illustrer les limites de la délocalisation industrielle en matière de santé à l’étranger. En effet, le 24 février 2020, deux jours avant que la première victime française du coronavirus ne soit à déplorer, le géant français des produits pharmaceutiques Sanofi a annoncé vouloir relocaliser la production de certaines de ses molécules phares en Europe. L’objectif étant de créer une nouvelle entité composée de six usines européennes du groupe, parmi lesquelles deux sont en France, dont le siège serait en région parisienne. 

 

Une réappropriation de la production face à la Chine qui est le premier fournisseur mondial en principes actifs pharmaceutiques est-elle envisageable ? La redécouverte de la dépendance occidentale vis-à-vis de la Chine en matière d’approvisionnement en médicaments révèle une position de faiblesse critique. La FDA (Food and Drug Administration) américaine annonçait jeudi 27 février qu’un médicament était déjà en rupture de stock aux États-Unis. Un rapport sénatorial français pointait la dépendance de la France vis-à-vis de la Chine et de l’Inde (qui produisent 60% des composants actifs utilisés en France). Les produits les plus vulnérables sont les produits les moins chers dont on délocalise la production afin d’augmenter la marge réalisée lors de la vente de ceux-ci. Parmi eux il y a les antibiotiques, les médicaments contre l’hypertension et le diabète, des antidépresseurs ou encore certaines chimiothérapies.

 

Le contexte de la double épidémie de Covid-19 et de peste porcine affecte particulièrement la Chine et le secteur pharmaceutique. Si la première a pour effet d’affecter directement les humains et réduire les flux de marchandises sortant de Chine, la peste porcine décime des élevages entiers de porcs en Chine. Peu de communication sur le sujet mais, au-delà de la viande, le cochon représente une véritable source de matière première utilisable dans l’industrie pharmaceutique après purification et modification chimique. La gélatine de porc notamment, est présente dans de nombreux vaccins et dans la majorité des médicaments en gélule. Les extraits des boyaux de porcs sont également utilisés pour fabriquer des anticoagulants, très répandus dans le domaine de la chirurgie. Double peine pour la Chine… et pour le reste du monde.

 

Ce « départ » de Chine souhaité par le groupe Sanofi s’opère dans un contexte d’approvisionnement tendu : on dénombre en 2018 « dix fois plus de tensions d’approvisionnement » qu’en 2008. Par ailleurs, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2020 oblige les industriels à posséder des stocks de sécurité d’au moins quatre mois, sous peine d’amende. Réduction d’indépendance ? Réduction des risques d’amendes ? La réponse se trouve probablement entre ces deux choix. Toujours est-il que ce changement stratégique, bien que forcé, s’inscrit dans une phase de renforcement souverain dans le secteur de la santé en France.

 

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