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L’Union Européenne ouvre les yeux et déclare la guerre aux “Killer Acquisitions”

Vendredi 21 mai 2021, la Commission Européenne a décidé d’agir contre les acquisitions tueuses de start-up et de sociétés innovantes. L’Union semble changer sa politique en matière d’acquisition étrangère et semble décidée à défendre les nouveaux fleurons européens. Une nouvelle stratégie particulièrement visible via deux affaires : CureVac et Grail, démontrant la prise de conscience qui vient de s’opérer à Bruxelles, bien aidé par le Covid.

La crise de la Covid-19 et l’affaire CureVac ont permis d’ouvrir les yeux à la Commission Européenne. En effet, cette dernière a une nouvelle cible : les « Killer acquisitions » opérées sur les start-up innovantes européennes. C’est pourtant un business model qui consiste pour les grandes entreprises à laisser des plus petites structures supporter les coûts de R&D avant de les racheter si les projets aboutissent. Outre-Atlantique c’est même un modèle institutionnalisé via la “Barda”. Par conséquent, la Commission a décidé d’autoriser les différentes autorités de la concurrence des États membres à lui transmettre certaines opérations d’acquisition ou concentration, pour lesquelles les seuils de notification nationaux ne sont pas atteints, selon les Echos. 

Cet électrochoc a pour origine la tentative de rachat par la Maison Blanche de CureVac en mars 2020 durant la course pour les vaccins. Cette tentative de rachat du laboratoire allemand à prix d’or avait déclenché de légères tensions entre l’Allemagne et les États-Unis du fait de l’avancement du laboratoire dans la recherche d’un vaccin, alors même que Bruxelles appelait à la solidarité internationale. Plus récemment, c’est la société de dépistage en cancérologie Grail qui s’est vue être la cible d’une proposition de rachat à hauteur de huit milliards de dollars, par son ancienne maison mère Lumina encore actionnaire à hauteur de 14,5 %. La Commission a dès lors engagé une procédure d'examen du possible rachat de Grail par Lumina au nom du règlement N°139/2004 relatif au contrôle des concentrations des entreprises. C’est donc la première affaire depuis le changement d’orientation de la stratégie européenne démontrant la volonté à long terme de l’Union de protéger ses nouvelles sources d’innovation. 

L’Union envoie un signal à ses États-membres afin de protéger leur patrimoine scientifique, technique et économique, et par conséquent, celui de l’Union. Ce changement de stratégie pourrait être la première pierre d’une stratégie défensive de protection des fleurons européens. Il est alors légitime de se demander comment ce signal sera interprété en France, l’un des pays les plus ciblés par les rachats étrangers, et surtout peu enclin à s’y opposer au nom du libre-échange malgré une prise de conscience récente. 

 

Ugo Viens 

 

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