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La New Development Bank BRICS : une nouvelle donne économique?

Le 6ème forum sur la coopération sino-africaine qui s’est ouvert le 4 décembre 2015 à Johannesburg est révélateur des liens économiques poussés qu’ont tissé entre eux les pays en développement, au premier rang desquels s’imposent les BRICS. Cette stratégie de rapprochement économique s’est symbolisée, le 21 juillet 2015, par la création de la New Development Bank BRICS, nouvelle institution, concurrente du FMI.

Le FMI : une institution sous tutelle américaine

Créé aux États-Unis et siégeant à Washington, le Fonds monétaire international (FMI) est composé de 188 pays. Son objectif principal est de fournir des prêts aux pays membres qui éprouvent des difficultés réelles ou potentielles dans leur balance de paiement.
Pour toute action du FMI, 85% des voix sont nécessaires pour approuver une décision. Aujourd’hui seuls les États-Unis disposent de plus de 15% des voix (16.4% exactement) leur octroyant un pouvoir de veto sans limitation. Cela signifie qu’aucune décision du FMI ne peut être prise sans l’accord explicite des États-Unis.

Une tentative de réforme menée par Dominique Strauss-Kahn puis par Christine Lagarde vise à augmenter les ressources du FMI via un doublement des quotes-parts et à réaligner les quotes-parts relatives pour donner moins de poids aux États-Unis en faveur des pays sous-représentés comme les BRICS. En effet, ces derniers sont aujourd’hui sous-évalués au sein du FMI.  La Chine par exemple, 1ère puissance économique mondiale, ne possède que 3,81% des voix. Cette réforme fut votée à la quasi-unanimité en 2010, par  187 pays … à l’exception des Etats-Unis. Elle ne fut donc pas adoptée et  l’objectif des 85% n’a pas été atteint. Un nouveau vote a été effectué en 2014 découlant sur le même résultat. Ce blocage américain persistant a poussé les BRICS qui représentent 41,4% de la population du monde et plus de 25% de son PIB à créer leurs propres organismes.

La contre-attaque des pays émergents

C’est à Fortaleza que l’accord a été signé, à l’occasion du sixième sommet annuel des BRICS. Le mardi 15 juillet 2014, la création d’une Banque de Développement est actée à l’unanimité. Yves Zlotowski, économiste en chef de Coface nous confirme que « ces pays cherchent à créer un système alternatif aux institutions dominées par les nations occidentales, Fonds monétaire international (FMI) et Banque mondiale».

La New Development Bank BRICS (NDB BRICS) est lancée. Son siège est situé à Shanghai, et son président, M.Kundapur Vaman Kamath, est Indien. La volonté qu’a cette nouvelle banque de s’écarter des règles du FMI est claire. Comme l’a affirmé son président: « dans la nouvelle banque de développement, tous les pays participants auront chacun une seule voix, et aucun pays n’aura de droit de veto ». Cette citation est  directement affichée sur la page d’accueil du site internet de la NDB BRICS. De plus, la NDB BRICS n’accompagne pas ses prêts de conditions contraignantes, « en cela, elle différe du FMI, qui exige des réformes structurelles et une ingérence politique intolérable en échange de son aide », explique Anton Silouanov, le ministre des finances russe.

Grâce à cette NDB BRICS, les pays fondateurs voient leurs poids politiques augmenter et profitent d’une meilleure coopération. Dilma Roussef, la présidente brésilienne s’en félicite : « c’est une contribution importante pour la reconfiguration de la gouvernance économique mondiale ».

Par ailleurs, les deux premiers projets de la NDB BRICS sont lancés:

– un projet de data center pour Xiaomi-hosting avec un investissement initial de 2,5 milliards de yuans
– un système d’alerte international avec  l’Organisation « Protecting Land » à hauteur de 500 millions de yuans.

Cette banque a commencé avec un capital de 50 milliards, montant qui devrait être doublé  dans un futur proche. Elle pourra ainsi financer les projets d’intérêt général comme celui des infrastructures par exemple (routes, barrages, télécommunications, éducation, santé, etc.).

L’initiative des BRICS comporte une forte charge symbolique. Elle démontre que les institutions à la tête de l’économie mondiale ne sont pas à l’abri de la création d’organisations concurrentes si elles refusent de se réformer et d’entendre la voix des nouvelles puissances montantes.

Florian Estebe