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L’urgence climatique, un levier utilisé par les ONG pour influencer les politiques d’investissement des banques françaises

Depuis les Accords de Paris, la question climatique conditionne de plus en plus le comportement des acteurs économiques. Les banques n’échappent pas à cette tendance et font l’objet d’une évaluation plus poussée de leurs empreintes carbones et leurs activités. Les ONG jouent un rôle particulièrement important dans ce phénomène en mobilisant l’opinion publique pour influencer les choix d’investissement. Dernier cas en date, le mégaprojet gazier de Total en Arctique, dans lequel les Amis de la Terre ont joué un grand rôle dans le retrait d’activités de la BPI.

Face à l'urgence climatique déclarée par les politiques, mais aussi les scientifiques, l’ensemble des acteurs économiques sont influencés dans leurs comportements. Que ce soit des entreprises privées comme TotalEnergies, l’État avec « l’Affaire du siècle », ou les critiques publiques sur les activités de crédits des banques, la responsabilité sociale et environnementale des acteurs économiques est devenue un élément essentiel de leur stratégie.

À ce titre, la BNP est sous le feu des critiques des ONG depuis plusieurs années. La dernière en date est un rapport d’OXFAM sur les émissions de CO2 des banques françaises. Selon le rapport de l’ONG Banking on Climate Chaos 2021« chacune des quatre premières banques françaises – BNP Paribas, Crédit agricole, Société générale et Banque populaire caisse d’épargne (BPCE) – génère, à elle seule, une empreinte carbone supérieure à celle du territoire français ».

L’ONG précise que, selon son analyse, « les quatre plus grosses banques françaises ont ainsi injecté près de 250 milliards d’euros dans les secteurs du charbon, pétrole et gaz » depuis la COP 21. Ces critiques permettent aux politiques d’utiliser l’opinion publique afin de pousser les banques à investir dans les ENR (énergies renouvelables) en France. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, partisan d’une France leadeuse dans les ENR, en particulier l’hydrogène, a déclaré à la fin du Climate finance day 2021 (26 octobre 2021) que  « les six plus grandes banques françaises se sont engagées à arrêter, dès 2022, le financement des projets d'exploitation de pétrole de schiste, de gaz de schiste, de sables bitumineux. C'est très bien, mais ce n'est pas suffisant ». En réponse au rapport d’OXFAM, la Banque Postale, BNP Paribas et la Société Générale ont rédigé  une lettre en deux axes : le premier réaffirme leur engagement dans la lutte pour le climat ; et le deuxième met en doute la méthodologie du rapport.

Sur le plan européen, la BCE a établi un constat similaire. Elle invite les grandes banques de la zone européenne à prendre en considération les risques climatiques, en vue d’une évaluation des capacités de résilience au cours d’un stress test en 2022. Il n’en demeure pas moins que les banques françaises restent à ce jour les plus exposées financièrement aux risques climatiques, selon le rapport de la Banque de France

Ce constat oblige les banques à établir une restructuration de leurs stratégies d’investissements prioritaires en privilégiant les énergies renouvelables. La Banque Postale est à ce titre la première à déclarer officiellement son objectif de sortie du marché des énergies fossiles pour 2030. Une manière de se démarquer et d'éviter de faire l’objet d’une campagne médiatique négative de la part des ONG. Cette tendance qui ne cesse de s’accentuer, a créé une nouvelle dimension éthique que les acteurs bancaires sont davantage forcés d’intégrer. Par ailleurs, bien que ce phénomène soit relativement récent, il donne un nouveau souffle aux banques éthiques et néobanques, obligeant d’autant plus les banques traditionnelles à prendre en compte les préoccupations actuelles de l’opinion publique sur les questions environnementales.

 

Pierre Coste

 

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