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Les cheats, fléau pour les joueurs, opportunité pour les hackers

Depuis la pandémie de la COVID-19 et avec les différents confinements, la vente de jeux vidéo dématérialisés et de consoles/PC a explosé, conséquence d’un afflux massif de nouveaux consommateurs. Cet accroissement soudain de joueurs n’est pas sans conséquences négatives, dont la multiplication de l’utilisation des cheats et des malwares.

Les cheats, un must-have dans l’univers des jeux vidéo.

Cheat, la triche en anglais, désigne tous les moyens permettant de modifier les règles du jeu pour obtenir des avantages durant une partie. Une personne faisant recours à ce type de pratique est considérée comme un « cheateur » ou encore un « tricheur ». Le fait de tricher dans un jeu vidéo est aussi désigné sous le terme « d’exploit » ou « d’action » avec le recours à des « glitches » qui sont des failles à l’intérieur du jeu, ou d’exploitation “client side” qui permettent d’envoyer de fausses informations au serveur. L’existence des cheats n’est pas un hasard, elles sont présentes pour faciliter les tests aux développeurs lors de la conception d’un jeu.

Les cheats sont particulièrement présents dans les jeux vidéo en ligne multijoueurs. Ce principe est surtout utilisé pour augmenter les compétences du joueur à défaut des autres. L’entreprise néerlandaise Surfshark spécialisée dans la récolte et l’analyse de données a présenté une étude, Hacking Wins, sur les cheaters dans les jeux vidéo. Ce rapport montre que les jeux Fortnite et OverWatch sont à la tête du classement concernant le nombre de vues et de vidéos youtube pour savoir comment tricher sur le jeu (utilisation des Aimbot et Wallhacks). La plupart des cheats sont créés par des hackers qui ont les capacités à prendre le contrôle d’un système informatique sans but criminel, ou de brouiller le code informatique du côté client avec des programmes externes (exemple avec les bots ou les aimbots). Cela est possible pour eux, car les jeux vidéos sont en réalité un logiciel pouvant être détourné par le biais de modification de code, mais aussi car cela est réalisable sur un PC.

Un cheat a différents moyens d’être créé et de fonctionner. Le plus simple consiste à modifier les fichiers du jeu. Cette méthode est plus facile à réaliser sur des jeux offline qui ne sont généralement pas couverts par un anti-cheat, car il n’est pas nécessaire de toucher à des fichiers qui vont être “patchés” régulièrement. Il n’est pas impossible de réaliser cela sur des jeux en ligne, mais c’est un exercice plus compliqué car les données sont stockées directement sur les serveurs du jeu et sont donc “intouchables”. Afin d’avoir un cheat efficace et adapté sur des jeux en ligne et solo, il faut le créer soi-même, l’acheter ou utiliser un logiciel comme cheat engine. Cependant, cela apporte un risque, tant à l’utilisateur du cheat (risque de ban), qu’aux autres joueurs, en raison de l’exploitation de failles.

 

Une généralisation de l’emploi des cheats.

Dans une des parties de l’étude de Surfshark qui se penche sur les données géographiques, il a été possible de dresser une carte des pays les plus curieux de Aimbots et de Wallhacks, en comparant le nombre de recherches portant sur la triche et la population d’internautes dans les différents pays. Le pays qui serait le plus porté sur la triche dans les jeux vidéos est la Suède, avec près de 3000 recherches sur le sujet sur plusieurs millions d’habitants. Après, le nombre de recherches sur internet n’est pas synonyme de triche réelle, mais peut-être juste signe d’intérêt et de curiosité sur le sujet. En seconde position nous retrouvons les États-Unis.

De nombreux sites Internet spécialisés interviennent dans la commercialisation des cheats, dans leur revente, mais aussi dans la proposition d’abonnements mensuels. La distribution de ces logiciels a été qualifiée “d’acte de concurrence déloyale”, entraînant des préjudices économiques pour l’éditeur de jeux avec la diminution de la communauté de joueurs. Un cheat exploite une faille de code dans le jeu, donc une vulnérabilité. À moins de coder soi-même son logiciel, on va régulièrement aller en chercher un sur internet. L’un des plus gros risques pour les utilisateurs est de tomber sur un faux site internet de vente de cheats qui va “vendre” un faux logiciel de type stealer ou un malware. Toutes les données de l’utilisateur vont être récupérées et revendues à des fins malveillantes. « Si les tricheurs sont si nombreux et bien équipés depuis presque vingt ans, c’est d’abord parce qu’il est très facile de trouver des cheats sur Internet…», indique Sébastien Wesolowki.

 

Les logiciels d’anti-cheats

En 2020, l’éditeur Riot Games qui a sorti son FPS Valorant, a accompagné ce dernier d’un logiciel anti-cheat nommé Vanguard. Problème de ce logiciel, il restait toujours en activité, que l’on soit sur le jeu ou non, et directement au démarrage de l’ordinateur. Nous savons cependant que Vanguard a accès aux fichiers “vitaux” du système d’exploitation. Cela empêche l’utilisation de cheats, mais peut s’avérer également très dangereux car dans le cas de Vanguard, on a affaire à un rootkit, une porte d’entrée cachée vers l’ordinateur de l’utilisateur. Cela signifie que Riot a automatiquement un accès direct à toutes les données de votre ordinateur. Riot a dû se plier à l’exigence des utilisateurs, leur donnant la possibilité d’éteindre Vanguard lorsqu’ils ne sont pas connectés à Valorant. D’autres éditeurs possèdent également leurs propres logiciels anti-cheat. Nous pouvons citer le VAC (Valve Anti-Cheat) de Valve, distributeur qui possède Steam. Un autre “nouveau” venu a su s’imposer rapidement chez Epic Games avec son jeu phare, Fortnite, qui depuis 2017, ne cesse de gagner en popularité. Cependant, ce dernier n’a pas développé son propre logiciel d’anti-cheat, mais a préféré se reposer sur EasyAntiCheat.

Les jeux vidéo (comme pour tout programme informatique) sont en réalité un logiciel pouvant être détourné par le biais de modification de code. Suivant le cheat voulu, la technique va différer. L’achat et la commercialisation de cheats sont l’une des limites de cette pratique, avec les malwares, les violations RGPD des utilisateurs, mais aussi le désordre durant les parties et les compétitions avec les tricheurs qui touchent en grande partie les jeux multijoueurs. Le recours à la triche a pour effet d’altérer le jeu pour en tirer un avantage déloyal. Afin de contrer cela, les éditeurs se sont lancés dans la création d’anti-cheat  et le durcissement de la réglementation en compétition afin de réduire au maximum leur utilisation. Cependant, ces anti-cheat peuvent devenir des portes d’entrée tant pour les éditeurs que pour les pirates vers les ordinateurs des joueurs.

 

Elise Boyer et Thomas Salasca

 

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